L'assemblée législative

Bilan de la Constituante

Le travail accompli est immense. On est passé en 26 mois d'une monarchie absolue de droit divin s'appuyant sur un système féodal à une monarchie constitutionnelle à peu près égalitaire (distinction entre les citoyens actifs et les passifs). L'édifice est cependant bancal et ne peut qu'entraîner des évolutions ou des révolutions.

 

Les différents problèmes qui surgiront dans les mois à venir seront les conséquences des quatre problèmes suivants:

 

Louis XVI n'est pas prêt à jouer le rôle d'un monarque constitutionnel et souhaite un retour total et sans concession à l'ancien régime.

 

La bourgeoisie (majorité de l'Assemblée : Feuillants et modérés) ne souhaite pas de nouvelles avancées qui permettraient au peuple une participation plus importante à la vie du pays (Loi Le Chapelier sur les organisations des mouvements ouvriers)

 

Le peuple des villes (représenté particulièrement par la Commune de Paris) se sent frustré et floué par ce nouveau régime dont il attendait tout et qui lui refuse certains droits sous prétexte d'être des citoyens passifs.

Le clergé et la majeure partie de la population catholique sont divisés et dérangés par la Constitution civile. Une séparation totale Eglise-Etat eût été bien préférable.

Les débuts de la Législative

Deux tours d'élections étaient prévus par la Constitution, le premier consistant à nommer les électeurs du second tour avait eu lieu en juin 1791. Les 4,3 millions de citoyens actifs masculins (pour 1,9 millions de passifs) avaient élu 1% des leurs qui formeraient les assemblées électorales du second tour. Le second tour eut lieu du 29 août 1791 au 5 septembre 1791, jours pendant lesquels les assemblées électorales achevèrent la nomination des nouveaux députés. De par le suffrage censitaire, l'écrasante majorité des députés était d'origine bourgeoise, pas de sans-culotte, pas de va-nu-pieds ni d'ailleurs de richissimes propriétaires ou de riches banquiers. Ils sont donc 745 nouveaux députés à apparaître, dont la majorité a moins de 30 ans et 60 ont moins de 26 ans (Michelet dit : " Plus de cheveux blancs, Une France nouvelle aux cheveux noirs "), ce sont essentiellement de simples propriétaires et des avocats mais l'on y compte également 26 prêtres, 28 médecins ou savants et quelques militaires. Tous prêtèrent le serment des Jacobins "Vivre libre ou mourir

 

Rappelons que cette nouvelle Assemblée n'a aucun pouvoir constitutionnel, elle a l'initiative des lois et un droit de regard sur les ministres, elle détermine le niveau du contingent militaire et propose le budget. Le roi ne peut ni la dissoudre ni la convoquer.

Le vote avait en fait été très peu suivi, selon les départements, entre 25% et 33% de participation environ. La droite monarchiste disparaissait de l'Assemblée ainsi que le haut clergé. Les députés se répartissaient en trois groupes:

 

à droite, les Feuillants et quelques aristocrates libéraux (264). Partisans d'une monarchie constitutionnelle, ils sont hostiles à tout retour au passé et veulent une application stricte de la Constitution. Inspirés par le triumvirat (Barnave, Lameth, Duport) et par La Fayette ils souhaitent en rester à ce stade de la Révolution. Parmi eux, le général Mathieu Dumas, Jaucourt ou Girardin.

les Jacobins, minoritaires, à gauche (136) venus de Paris ou de Province (Bordeaux) nommés aussi les Brissotins du nom de leur chef de file Brissot. Leurs orateurs seront les députés de Bordeaux Vergniaud, Guadet, Gensonné ou Grangeneuve, leur penseur sera Condorcet . Issus de la moyenne bourgeoisie et relativement modérés, ils devront tenir compte de l'extrême gauche qui regroupe des membres du club des Cordeliers (Basire, Chabot ou Merlin) et des individus isolés comme Couthon ou Carnot.

au centre le Marais (345) regroupe des constitutionnels et des partisans d'une monarchie modérée.

 

Trois figures s'imposent d'emblée, toutes trois représentatives de la gauche de l'Assemblée, Brissot, chef des Girondins, homme au passé pas très net, embastillé sous l'ancien régime homme de lettres et brillant orateur, Vergniaud avocat de Bordeaux orateur prestigieux mais de nature indolente et Pétion de Villeneuve très lié à Robespierre et très populaire qui sera bientôt élu maire de Paris face à La Fayette. Face à eux, aucun des députés Feuillants ou centristes ne fait vraiment le poids.

 

Lors de l'élection du président de séance, les Feuillants parviennent à imposer sans difficulté un homme du Marais le marquis de Pastoret. Tous les débats qui se dérouleront à la Législative seront prolongés dans les différents clubs et dans les sections de Paris où les citoyens passifs participeront aux débats. La province ne resta pas à la traîne; des clubs un peu partout dans les grandes villes relayaient les discussions à l'Assemblée et faisaient remonter la température de la province à la capitale. D'abord relativement modérés, ces clubs glisseront de plus en plus vers des idées républicaines. L'émigration ayant privé la contre-révolution de ces chefs (officiers, châtelains, membres du haut clergé) les Jacobins n'affrontaient que peu d'adversaires.

 

Lors des premières séances des difficultés d'ordre protocolaire surgissent. La manière dont elles seront résolues est très représentative de la Législative. Tout d'abord, le 5 octobre, les députés sur proposition de Couthon, et emportés par l'éloquence d'un Vergniaud, votent un décret détaillant le nouveau protocole qui précise entre autres que le roi ne doit plus être appelé ni Sire ni Majesté et qu'un fauteuil identique à celui du président de l'Assemblée devra remplacer son trône au manège. Suite à des pressions extérieures et à des retournements d'opinions parmi les députés, le décret fut rapporté le 6 octobre et le roi vint donc à l'Assemblée le lendemain. Il fut accueilli aux cris de "Vive le roi !" et "Vive sa Majesté !". De telles indécisions laissaient présager d'une Assemblée peu sure d'elle et beaucoup trop sujette aux pressions extérieures.

 

Dés le début de la Législative, une alliance se met en place entre les Feuillants et le roi, alliance fondée sur une politique de recherche de prospérité, d'instruction et d'assistance à la pauvreté. Malheureusement pour cette alliance, elle allait devoir faire face à des problèmes que la Constituante n'avait pas ou incomplètement réglés.

Les difficultés de la Législative Le problème colonial et social

En 1789 les colonies françaises se résument aux Antilles à une moitié de Saint-Domingue, La Martinique, Sainte-Lucie, Tobago et la Guadeloupe ainsi que la Guyane en Amérique du Sud, Saint-Pierre et Miquelon dans l'Atlantique Nord, l'île de France, l'île Bourbon dans l'océan Indien, quelques comptoirs au Sénégal et cinq comptoirs aux Indes. En tout 55 000 Blancs, 32 000 Métis et Noirs libres et 600 000 esclaves. Les problèmes étaient apparus depuis août 1791 à Saint-Domingue où les Noirs et les Métis s'étaient soulevés. Des assemblées avaient été instituées par le décret du 8 mars 1790 mais elles ne tranchaient en rien les débats sur la souveraineté nationale et les aspirations autonomistes. Le 15 mai 1791 s'était achevé, à l'Assemblée, le débat sur les colonies qui maintenait l'esclavage. La nouvelle du soulèvement de Saint-Domingue fut connue fin octobre à l'Assemblée où des débats houleux eurent lieu entre les modérés et les démocrates. La droite dénonçait les manœuvres des modérés et osa même défendre l'esclavage, la gauche était divisée entre ceux qui souhaitaient une plus juste représentativité des hommes de couleurs dans les assemblées (Brissot) et d'autres qui souhaitaient ménager les armateurs de Bordeaux principaux bénéficiaires du commerce avec les colonies (Vergniaud ou Guadet). Les émeutes dans les colonies entraînant des manifestations en France courant janvier et février 1792, les Girondins font voter un décret le 28 mars 1792 stipulant que " les hommes de couleur et les nègres libres doivent jouir comme les colons blancs de l'égalité des droits politiques ". On ignorait toujours le problème de l'esclavage.

 

La principale conséquence des révoltes de Saint-Domingue fut que le café, le rhum et le sucre n'arrivaient plus en métropole. Le coût de ces denrées augmenta ajoutant encore à la hausse des prix. Des désordres éclatèrent où l'on dénonçait les accapareurs et les spéculateurs. Plusieurs émeutes eurent lieu un peu partout dans le royaume. La pénurie toucha également les grains. En effet la récolte céréalière de l'été 1791 n'avait été bonne que dans le nord de la France et mauvaise partout ailleurs. On dénonçait des accapareurs de grains et des spéculateurs au début de 1792. La crise sociale devint très vite générale et fut aggravée par la dépréciation inexorable des assignats. Ils avaient déjà perdu 44% de leur valeur depuis leur émission deux ans auparavant et 300 nouveaux millions venaient d'être émis en décembre ajoutant encore à la hausse des prix.

Les problèmes intérieurs et les émigrés

Dans les campagnes, quelques châteaux furent de nouveau incendiés, quand les paysans se rendirent compte que les redevances féodales n'avaient pas toutes disparues et que certaines étaient rachetables. Le principal problème restait cependant le conflit qui opposait les réfractaires et les constitutionnels. Des troubles avaient éclaté en Vendée, en Bretagne en Anjou et en Lozère. Le 29 novembre 1791 un décret menaçe d'emprisonnement tous les prêtres refusant de prêter le serment à la Constitution sous un délai de huit jours. Des "apôtres de la liberté" sont envoyés par les Jacobins dans toutes les provinces. Porteurs des idées nouvelles ils organisent des cérémonies collectives telles que les plantations d'arbres de la liberté. Le ton monte et se durcit rapidement entre certains Jacobins qui font preuve d'un anticléricalisme virulent et une paysannerie farouchement attachée à ses lieux de culte et à ses anciennes pratiques religieuses. Le 16 avril 1792 un décret qui ne faisait en rien avancer la Révolution ira même jusqu'à interdire le port des habits ecclésiastiques.

 

A Avignon, la ville était ensanglantée par des massacres qui eurent lieu entre les pontificaux partisans d'une enclave pontificale et les patriotes qui voulaient reprendre la ville. L'émigration posait également un véritable problème à la Législative et menacait la Révolution. Elle touchait maintenant un nombre plus important de personne, quelques dizaines de milliers. La première émigration n'avait touché que les hauts seigneurs qui souhaitaient se mettre à l'abri, celle de 1792 touchait des gentilshommes, des cadres de l'armée, des notables et presque toute la droite de la Constituante, tous ceux qui souhaitaient "opposer une digue à la Révolution " comme le proclamait le comte d'Artois à l'origine du mouvement. Cette émigration là représentait une menace pour la Législative. Le quartier général des émigrants d'abord installé à Turin de 1789 à 1791 avait maintenant sa cour à Coblence. Des projets s'y élaboraient sans aucune cohésion politique, chacun travaillant pour lui-même (comte d'Artois, comte de Provence, duc de Breteuil, Calonne ou maréchal de Broglie).

 

On y avait commencé l'organisation d'une armée aux ordres de Condé. Une vingtaine de régiments hétéroclites regroupant quelques 8 000 hommes d'origines diverses. Pour certains, ces fidèles étaient animés de convictions sincères; pour d'autres moins tendres ce n'étaient que des oisifs qui auraient beaucoup mieux servi leur roi en restant en France autour de Louis XVI.

 

Craignant de sévères mesures de la part de l'assemblée, Louis XVI demandait aux officiers de retourner à leur poste les 13 et 14 octobre 1791. Dans ce même temps Brissot demandait aux députés de considérer comme criminels les émigrés et princes de sang non rentrés dans un délai de 2 mois et de confisquer leurs biens . Le 31 octobre un décret sommait le comte de Provence de rentrer sous peine d'être déchu de ses droits au trône. Le 9 novembre 1791 un autre décret fut voté et emporté par les Girondins (Vergniaud, Gensonné et Isnard) portant la date limite de rentrée des émigrés au 1 janvier 1792 sous peine de confiscation des biens et de peine de mort par contumace (opposition de Condorcet).

 

En décembre, Louis XVI sanctionna le décret qui atteignait son frère mais usant de son droit de veto s'opposa aux décrets sur les émigrés et à celui du 29 novembre sur les prêtres réfractaires. La presse dénonça alors celui qu'elle montrait comme le protecteur des ennemis de la Révolution. Les Feuillants et les constitutionnels soutenaient le roi estimant ces deux décrets contraires à la Constitution.

L'Europe et la course à la guerre

Depuis l'annexion du comtat Venaissin et sa transformation en un département du Vaucluse; depuis que les idées révolutionnaires gagnaient le Rhin et le Nord de l'Italie; depuis que les princes possessionnés allemands en Alsace se voyaient demander l'application des réformes sur la féodalité; Enfin depuis l'arrestation de Louis XVI à Varennes qui constituait un précédent fâcheux pour toutes les têtes couronnées d'Europe; les souverains d'Europe, Léopold d'Autriche en tête, commençaient à voir d'un mauvais œil cette France turbulente.

 

En France un courant favorable de la guerre se développait chez toutes les tendances politiques. Le roi ne pensait y trouver qu'avantage. Soit le conflit était victorieux et il en ressortait grandi du prestige d'un chef d'une armée victorieuse, soit le conflit tournait mal et les puissances européennes le rétabliraient dans ses anciennes fonctions. La Fayette attendait de cette guerre le commandement d'une armée qui jointe à sa garde nationale lui permettrait de chasser les Jacobins. Les Girondins, optimistes souhaitaient une guerre car ils ne croyaient possible qu'une victoire. Marat et Robespierre seuls s'élevaient contre cette idée, le premier craignait qu'une guerre n'amène à terme une dictature militaire, le second craignait que la promenade militaire décrite par les Girondins ne tourne à la débandade pour nos armées. Robespierre tentait, en vain, d'attirer l'attention de l'Assemblée sur les problèmes intérieurs. Brissot et Hérault de Seychelles combattaient ses opinions pas à pas. Le 6 décembre 1791 le comte de Narbonne fut nommé au ministère de la guerre. Bien que Feuillant, il soutint Brissot dans son idée de guerre pour plaire à l'Assemblée. Il pensait à une guerre limitée contre les électeurs allemands. Le 14 décembre 1791 le roi s'adressait à l'électeur de la principauté de Trèves en lui intimant l'ordre de disperser les rassemblements d'immigrés sur son territoire avant le 15 janvier 1792 sous peine de représailles. Le 21 décembre l'empereur d'Autriche avisait la France qu'il défendrait Trèves contre une agression française. La guerre semblait alors inévitable

 

La France tenta alors d'isoler l'Autriche face à elle en cherchant des alliés chez les Prussiens ou les Anglais. Ce fut un échec. Le 7 février 1792 Léopold II conclut une alliance avec Frédéric Guillaume de Prusse et le 28 février la Prusse fit savoir que toute invasion en Allemagne serait considérée comme un casus belli. Léopold II mourut le 1 mars et fut remplacé par François II beaucoup plus contre-révolutionnaire que son père.

 

En France la situation est tendue, le roi " Monsieur Veto " est attaqué régulièrement par la presse de gauche, les Brissotins s'attaquent aux ministres feuillants, et le peuple est mécontent. A la cour même des intrigues se jouent et le 9 mars 1792 Narbonne est démis de ses fonctions et est remplacé par le colonel De Grave. L'Assemblée profite aussitôt de ce renvoi pour manifester sa désapprobation au roi et au ministère Feuillant. Le 10 mars 1792, tout le ministère démissionne sauf De Grave. Du 15 au 23 mars 1792 c'est un ministère Girondin qui se constitue autour de Roland à l'intérieur, Clavière aux finances et Dumouriez aux affaires étrangères. Jusqu'alors soldat de second plan et diplomate intrigant, sans conviction ni foi particulière dans la Révolution Dumouriez veut s'en servir pour son ambition personnelle et est donc un chaud partisan de la guerre. Le 27 mars 1792 un ultimatum est envoyé à l'Autriche par Dumouriez, le plan français prévoit de s'appuyer sur les lignes de défenses naturelles et de porter la guerre à l'extérieur du territoire partout où cela est possible (Belgique au nord et possessions du royaume de Sardaigne au sud). De son coté la cour encourageait secrètement l'Autriche à la guerre en lui laissant prévoir que, rapidement, une grande partie de la nation se rallierait à Louis XVI et aux libérateurs.

 

L'Autriche refusa l'ultimatum de Dumouriez et l'Assemblée proposa aussitôt de déclarer la guerre à l'Autriche le 20 avril 1792. A cette occasion, tous les orateurs se déchaînèrent successivement à la tribune " il faut déclarer la guerre aux rois et la paix aux peuples ! " (Merlin de Thionville). Après lecture de la déclaration de guerre par Louis XVI, le décret est voté à l'unanimité moins sept voix. A la nouvelle la bourse monta légèrement et Condorcet dans la Chronique de Paris écrivait " Paix aux chaumières, guerre aux châteaux ". Dans le mot de Merlin de Thionville s'écroulent toutes les idées de guerre courte et limitée. La France se dresse à ce moment là contre toute la vieille Europe, et cette guerre va durer 20 ans.

Le 25 avril pour la première fois est chanté par Rouget de Lisle " le chant de guerre pour l'armée du Rhin " qui deviendra " la Marseillaise ".

La guerre

Le 28 avril 1792 c'est le début de l'offensive française en Belgique. Cette offensive, dirigée par Rochambeau, dont le but est de surprendre les Autrichiens tourne rapidement au désastre. Le 29 avril c'est la contre-offensive autrichienne qui entraîne la débandade de l'armée française.

 

Le général Dillon tentant de regrouper ses troupes est massacré à Lille. Heureusement pour la France les événements en Pologne la sauvent. La Russie poussait toujours les Autrichiens et les Prussiens en France pour avoir les mains libres en Pologne, mais ceux-ci n'étaient pas dupes et souhaitaient avoir leur mot à dire, aussi le temps passait et l'offensive générale des forces coalisées tardait. Le 12 mai 1792, le roi de Prusse fit décider une marche des coalisés sur Paris.

 

Le duc de Brunswick était nommé général en chef des forces austro-prussiennes (100.000 autrichiens, 42.000 prussiens, 5.000 émigrés).A l'Assemblée Robespierre triomphe et dénonce ces " orateurs qui excitaient à la guerre ". A Paris on crie partout à la trahison, des rumeurs courent que des prêtres réfractaires ont été retrouvés parmi les cadavres ennemis alors on s'en prend au clergé. Le 27 mai 1792 un décret menace de la peine de la déportation tout prêtre fauteur de troubles. Un autre bruit indique que la cour prépare une Saint-Barthélemy de patriotes avec l'aide de sa garde Constitutionnelle, le 29 mai un décret entraîne le licenciement de la garde Constitutionnelle.

 

Le 4 juin, le nouveau ministre de la guerre Servan propose à l'assemblée de regrouper autour de Paris un camp de 20.000 fédérés pour commémorer le 14 juillet 1789. La mesure présentée comme purement militaire est votée le 8 juin malgré l'opposition de Dumouriez qui considère la mesure dangereuse pour l'ordre public. Le roi sentant des tensions au sein de son ministère oppose son veto aux décrets et congédie une bonne partie des ministres Girondins le 12 juin 1792. L'Assemblée s'enflamme et une motion exprimant les regrets de la nation face aux décisions de Louis XVI est votée. Dumouriez qui n'a pas été renvoyé par le roi est hué à l'Assemblée lorsqu'il décrit l'état catastrophique des armées, il démissionne et prend un commandement à l'armée du nord.

L'été 1792 : la chute de la monarchie

Dans les clubs et dans les salons de Mme Roland, on préparait le peuple à manifester pour demander au roi " le rappel des bons ministres " et " la sanction des décrets ". L'occasion saisie sera l'anniversaire du serment du jeu de Paume pour lequel on a décidé de commémorer l'événement en plantant un arbre de la liberté sur la terrasse des Tuileries. Le 20 juin 1792, dès le matin le peuple armé de piques et l'esprit échauffé par le vin et par les meneurs comme Santerre ou Fournier demande à être reçu par l'Assemblée, celle-ci s'y opposant les manifestants entrent en force et une délégation déclare violemment à la tribune que " le peuple est debout … le sang coulera ou l'arbre de la liberté sera planté … les hommes du 14 juillet ne sont pas endormis et leur réveil sera terrible ".

Les manifestants se dirigent ensuite vers les Tuileries où les appartements du roi, sans protection, sont rapidement envahis par la populace qui demande la signature des décrets et le rappel des ministres Girondins. Le roi particulièrement calme, apparaît alors, se coiffe d'un bonnet rouge, accepte un verre de vin mais déclare fermement que ce n'est ni le lieu ni le moment de discuter ce genre de décision. Vergniaud puis Pétion arrivés tardivement mettent fin, sans violences, à la manifestation en fin d'après midi. Pétion déclare même " qu'il ne fallait pas que la réponse du roi eut l'air arraché de force mais qu'il se portait garant de celle ci ".

Partout en province et dans les milieux modérés l'indignation fut générale on avait touché à la personne du roi. Un mouvement contre-révolutionnaire assez fort se précisait et les Jacobins se sentaient minoritaires. Le 28 juin 1792 La Fayette revenu rapidement de l'armée, se présente à l'Assemblée où il dénonce au nom de l'armée les fauteurs de troubles et les clubs: l'Assemblée l'applaudit. A ce moment, avec le fort courant favorable au roi il aurait pu tenter un coup de force militaire pour rétablir le roi dans son autorité, mais la cour s'y oppose se moquant de ces " Don Quichotteries ", Marie-Antoinette dira même :" mieux vaut mourir que d'être sauvé par M. de La Fayette et les constitutionnels ". On rejette donc sa proposition et pire on le trahit en dénonçant son projet de profiter d'une revue militaire le lendemain pour marcher avec ses troupes sur les Jacobins.

La Fayette, découragé partit pour la frontière. Louis XVI venait de laisser passer son dernier espoir. Le mouvement de réaction qui avait suivi le 20 juin était fini.

Le 3 juillet 1792 Vergniaud demande un rapport sur la conduite déplorable de La Fayette et dénonçe la trahison du roi comme la cause de nos défaites. Hérault de Seychelles déclare à l'Assemblée " la Patrie en danger ". Les fédérés venus de Brest et de Marseille commençaient à arriver dans les rues de Paris où l'on entendait chanter les couplets suivants :

 

Nous le traiterons, Gros Louis, biribi,

A la façon de Barbarie, mon ami,

Gros Louis, biribi

 

Le roi réagit avec retardement à la journée du 20 juin en suspendant Pétion le 7 juillet 1792. Pétion est alors l'homme le plus populaire de son parti, élu à la mairie de Paris en octobre 1791 avec 63% des suffrages face à La Fayette (la reine avait encouragé à voter contre La Fayette et il y eut seulement 7 000 votants sur 80 000 inscrits). Cette suspension provoque la colère du peuple le 12 juillet et l'Assemblée annule illégalement la décision royale en rétablissant Pétion dans ses fonctions le 13 juillet. Le roi ne dit rien. Des demandes de suspension et de déchéance du roi se multipliaient à l'extrême gauche.

L'assemblée dans son ensemble était incohérente, les Girondins voulaient le rappel de leurs ministres mais étaient effrayés par la déchéance du roi. Condorcet voulait simplement rendre le roi " impuissant ". L'extrême gauche avec Chabot, Merlin ou Cambon réclamait haut et fort la déchéance de Louis XVI. C'est dans cette incohérence générale qu'eut lieu l'épisode fugitif d'une réconciliation générale connue sous le nom de " le baiser Lamourette ".


Sentant l'Assemblée débordée par sa gauche, par les clubs et par la rue, Brissot et Vergniaud tentent de négocier secrètement une alliance de la Gironde avec le roi, pour sauver le trône et la constitution. La gauche sentant la machination les dénonçait " Barnave " et " Barnave deux " disait t-on d'eux. Le 14 juillet 1792, lors de la fête de la Fédération la famille royale est insultée lors de la prestation de serment. Parallèlement à ces événements les fédérés arrivés à Paris étaient de plus en plus nombreux, plus de 5 000 à fin juillet. 600 Marseillais étaient arrivés au son de " la Marseillaise ". Ces fédérés destinés à combattre les alliés refusaient de quitter Paris tant que le roi ne serait pas déchu. Dirigés par un comité central composé en partie de certains meneurs comme Santerre ou Chabot, ils portèrent à l'Assemblée une pétition demandant la déchéance du roi.

 

Durant cet été 1792, des estrades pavoisées des trois couleurs recueillaient les engagements des volontaires. Ces volontaires refusaient par contre de partir tant que la trahison serait toujours aux Tuileries risquant de tuer par derrière les soldats de la nation. Le 29 juillet 1792 Robespierre demandait donc clairement aux Jacobins la déchéance du roi et une Convention Nationale : ce fut le mot d'ordre de toutes les sections de Paris ; il restait à la faire accepter par tous. Ce fut le manifeste de Brunswick, attribué et signé par le duc du même nom mais écrit par un émigré français, qui mit le feu aux poudres. Ce manifeste, connu début août à Paris, menaçait la capitale des pires châtiments si l'on touchait à la famille royale et, menaçait tout habitant qui oserait se défendre contre les troupes coalisées. Une telle déclaration excita les différentes sections qui déclarèrent successivement la déchéance du roi. Pendant quelques jours l'Assemblée affolée était soumise aux huées et aux acclamations des tribunes incapables de prendre une quelconque décision dans le calme et la raison. Les députés se séparèrent le 9 août au soir sachant qu'une émeute allait éclater. On venait de distribuer, le 4 août, 5 000 cartouches aux fédérés …

le 10 août 1792 et l'avènement de Danton

Le 9 août, à 23h45 la cloche des Cordeliers se mit à sonner. Danton donnait le signal. Depuis le début de la soirée les sections étaient prêtes à prendre le pouvoir à l'Hôtel de ville, la commune insurrectionnelle prenait le pouvoir à la commune légale.

 

Aux Tuileries la Garde nationale aux ordres de Mandat, 1 800 Suisses et 200 gentilshommes organisaient la résistance. A l'aube du 10 août 1792 Danton avait pris possession de l'Hôtel de ville. Mandat convoqué à la mairie et parti sans escorte fut aussitôt pris à partie puis abattu, Santerre prenait sa place. Les insurgés des sections et les fédérés marchèrent alors sur les Tuileries. Le roi réveillé tenta vainement de mobiliser la Garde nationale sans chef mais ne trouva pas les mots et une partie de la Garde fit défection.

 

Sur le conseil de Roederer il partit avec la famille royale se réfugier à l'Assemblée. Accueillis par un discours qui se voulait rassurant du président Vergniaud, ils furent placés dans une petite salle attenante au manège où ils restèrent toute la journée. A 8h le jardin des Tuileries fut investi, les Suisses barricadés dans le palais déclenchèrent une première fusillade qui mit hors combat une centaine d'assaillants et provoqua la fuite des autres. Les Suisses tentèrent alors une sortie mais les émeutiers furent entre temps renforcés par une colonne de manifestants venue du faubourg Saint-Antoine. Les Suisses durent se replier une nouvelle fois dans le château. La fusillade fut entendue depuis le manège. Le roi, sur insistance des députés, signa un billet donnant l'ordre aux Suisses d'arrêter le combat et de se rendre. Ils obéirent mais il furent rapidement cernés et massacrés par les émeutiers. Un sentiment de fureur secoua alors les manifestants qui s'en prirent à des gentilshommes (Clermont-Tonnerre), des domestiques ou des gardes du château; 800 hommes furent massacrés. On peut dire que le 10 août fut la première journée de la Terreur.

 

L'Assemblée n'était pas au complet (à peine 300 députés sur 750). Elle dut cependant prononcer la suspension du roi et son internement au Luxembourg à la demande pressante de la commune insurrectionnelle qui demandait la déchéance. Le 12 août 1792, sur la demande de la commune, la famille royale fut internée au Temple sous sa garde. A cette date on peut parler d'une seconde révolution, c'est cette fois la fin de la monarchie constitutionnelle. Si la première période (juillet 1789 - août 1792) avait recueilli l'adhésion quasi unanime de toute la population, cette seconde période perdra définitivement les catholiques et verra s'éloigner d'elle les hésitants troublés par la journée du 10 août. Seuls lui resteront fidèles ceux qui "ne craignaient ni Dieu ni Diable", ils ne constituaient qu'une minorité mais ils étaient résolus à aller de l'avant.

 

Huguenin élu président de la commune insurrectionnelle conclut une alliance avec les députés de gauche et ensemble ils demandent une dissolution de l'Assemblée et son remplacement par une nouvelle assemblée constituante. La commune insurrectionnelle, ses 82 membres et 288 députés se préparent à jouer un rôle de tout premier plan dans la nouvelle conjoncture qui s'ouvre.

 

Les véritables perdants de la journée du 10 août sont, hormis Louis XVI, les députés constitutionnels et les Girondins. L'assemblée était réduite à tout juste 280 députés, "la droite s'était enfuie, le centre était à peu prés volatilisé, la gauche était opprimée par l'extrême-gauche" (L. Madelin). Le gagnant en est Danton qui décide aussitôt qu'un conseil exécutif, remplaçant le roi, doit être élu. Le premier membre de ce conseil est Danton, élu par 222 sur 285 votants. Il prend le portefeuille de la justice. Monge prendra la marine, Le Brun les relations extérieures, Roland, Servan et Clavière récupèrent leurs anciens portefeuilles (intérieur, guerre et finances). Seul montagnard, Danton domine largement tout ce ministère à tendance Girondine. Il s'adjoint rapidement Camille Desmoulins et Fabre d'Eglantine puis fait entrer au comité judiciaire de son ministère Barère, Collot d'Herbois et Paré, Robespierre ayant refusé d'être son subordonné.

 

Dès août 1792 il va tenter de mettre en place un mouvement général qui devra dresser toute la Nation devant l'ennemi. En quelques semaines il va réorganiser tout le pays mais il aura cependant laissé faire les massacres de septembre sans réagir.

 

Trois groupes vont se partager le pouvoir :

 

La Commune de Paris qui a dirigé l'insurrection est composée de 82 commissaires et de 288 membres élus au suffrage universel dans la petite et moyenne bourgeoisie. Elle est dominée par Robespierre et impose à Paris sa prééminence sourdement contestée par la législative et le Conseil exécutif.

L'Assemblée législative encore porteuse d'une certaine légalité constitutionnelle bien que privée de sa droite (sur les 745 députés de septembre 1791 il n'en reste plus que 260).. Il ne lui reste plus que quelques semaines à vivre, elle tente vainement de s'opposer à la Commune.

 

Le ministère Danton tout puissant parce que débarrassé de la tutelle du roi et de son veto. C'est dans cet enchevêtrement institutionnel que pendant 40 jours (jusqu'au 21 septembre 1792) seront prises de très lourdes décisions sans aucune légitimité constitutionnelle Un homme domine cette période c'est Danton: est-il le patriote exemplaire ou le politicien vénal ?. En 1789 il est capitaine dans la Garde nationale. C'est lui qui fonde et qui préside le club des Cordeliers. Il devient membre de la commune en janvier 1790, ses discours sont résolument orientés contre Sieyès, La Fayette et le roi. Il se caractérise par une totale absence de scrupule mais ne sera jamais vendu. Ce n'est pourtant pas un doctrinaire; il pardonne tout (tout le contraire de Robespierre). Dans son premier discours du 19 août on sent beaucoup moins le ministre que le chef du gouvernement. Jusqu'au 21 septembre 1792, en 47 jours il va signer plus de 800 décrets. Ces décrets porteront sur l'appel à la résistance contre les Prussiens, l'organisation de la défense, le renversement de l'église inconstitutionnelle, l'établissement du divorce, l'égalité entre les hommes blancs et de couleur, la vente des biens des immigrés, le partage des biens communaux aux plus pauvres, la conduite énergique de la guerre, les libertés politiques et individuelles, la suppression des derniers droits féodaux, la division des terres féodales en petites parcelles distribuée aux paysans.

 

Le 12 août 1792 la Législative autorise les assemblées des différents départements à arrêter les suspects. La découverte des documents trouvés aux Tuileries dans "l'armoire de fer" prouve le double jeu du roi et de la reine et déchaîne les passions. Le 13 août 1792 la Commune décrète l'an I de l'égalité. Le 26 août 1792 un décret de bagne pour les prêtres non assermentés est signé. Une nouvelle levée de 30 000 hommes est demandée. Longwy, qui s'est rendue sans se battre, doit être détruite et ses habitants sont privés pour 10 ans de la nationalité française.

Les massacres de septembre

L'invasion de la France commençait. Le 19 août 1792, les coalisés avaient franchi la frontière. 70 000 Prussiens et Autrichiens formaient l'armée de Lorraine. 30 000 hommes au nord menaçaient Lille.

 

En réserve 22 000 Autrichiens et émigrés se tenaient à proximité de l'Alsace. En face les armées françaises, reprises en main, ne se débandaient plus comme en Belgique. Dumouriez avait remplacé La Fayette à l'armée du Nord et Luckner était relégué à l'arrière. Les bataillons de volontaires indisciplinés de 1791 puis ceux de 1792 se mêlaient à l'ancienne armée royale et petit à petit les généraux allaient en faire une véritable armée en pratiquant l'amalgame que préconisait Kellermann. Ce sont ces bataillons de volontaires de 1791 qui allaient élire pour chefs de bataillon des Bessières, Marmont, Davout, Victor, Suchet ou Oudinot, ceux de 1792 qui éliront des Mortier, Gouvion, Lasalle ou Joubert. Malgré ces noms prestigieux, Longwy dut cependant capituler le 22 août et Verdun le 2 septembre, la route de Paris était ouverte. Le dernier rempart existant était constitué par les armées de Kellermann et de Dumouriez alors séparées par une armée coalisée.

 

A Paris des rumeurs de complot circulaient. Depuis le 10 août les prisons regorgeaient de partisans supposés du roi. La Fayette venait de passer aux Autrichiens le 20 août, on disait que les aristocrates et les prêtres réfractaires s'apprêtaient à massacrer les patriotes. C'est dans ce climat de suspicion qu'eurent lieu les horribles massacres de septembre. Le 30 août 1792 une visite domiciliaire fut déclenchée dans la nuit par la Commune. La perquisition commença avec l'arrestation et l'incarcération dans les prisons de la capitale d'environ 3 000 personnes. Du 2 au 6 septembre 1792 une centaine de massacreurs parcoururent les prisons et tuèrent environ 1 200 personnes dans des simulacres barbares de jugement. Bien que les premiers exécutés soient des prêtres, on dénombre parmi les massacrés 72% de droit commun et 17% de prêtres. Certaines prisons furent totalement vidées comme aux Bernardins (73 tués sur 75), Saint-Firmin (75 tués sur 91) ou le Châtelet (220 tués sur 269).

La Commune avait laissé faire, Billaud-Varenne alors substitut du procureur encourageait les massacres, versant 24 livres aux massacreurs. Elle enverra même une lettre aux autres départements justifiant et encourageant de tels actes dans toute la France. Pétion, maire de Paris, ne fit rien non plus : Ponce-Pilate. L'Assemblée terrorisée affectait de ne rien savoir, prétextant qu'il n'y avait dans les prisons que des scélérats. Roland dira " il faut arrêter l'effervescence populaire parce qu'on pourrait en abuser" (sic), Couthon "Le peuple continue à exercer sa souveraine justice", Morris "les assassinats continuent ..., le temps est agréable ". Danton seul eut pu arrêter les massacres mais il ne voulait surtout pas se brouiller avec la Commune; il laissa donc faire s'excusant en disant des massacres que "nulle puissance n'aurait pu les arrêter" ou bien "vox populi vox Dei, c'est l'adage le plus vrai et le plus républicain que je connaisse".

 

Cette première terreur fut-elle un mouvement populaire ? ou un moyen autoritaire de gouverner ?. Sans cette terreur il n'y aurait certainement pas eu de Montagne à la Convention. Les massacres avaient fait peur aux modérés qui se cachèrent. Les Girondins qui songeaient encore, fin août, à maintenir la royauté eurent peur également et y renoncèrent. L'idée de république triomphait.

Une autre conséquence, négative celle-ci, de ces journées fut une déconsidération de l'idée même de la Révolution par les milieux modérés et une indignation de la province vis à vis de Paris.

Pendant ce temps les volontaires et les fédérés partaient pour la frontière et Danton demandait à la tribune "De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace !".

La fin de la Législative

Le 11 août 1792, suite à la chute de la monarchie, Vergniaud avait proposé un décret afin de mettre en place une nouvelle assemblée ayant pour charge de donner à la France une constitution nouvelle prenant en compte l'abolition de la monarchie.

 

Cette assemblée constituante prit le nom de Convention sur le modèle des Etats-Unis d'Amérique. L'élection de cette assemblée serait faite comme pour la Législative c'est à dire par des élections à deux degrés. Le premier degré abolissait cependant la distinction entre citoyens actifs et passifs. Tous les citoyens de plus de 21 ans pouvaient voter. Pour être éligible les mêmes conditions s'appliquaient et l'âge requis était de 25 ans. Chaque département nommerait le même nombre de députés que pour la Législative. La proposition fut aussitôt acceptée et dès la fin du mois d'août les assemblées primaires nommèrent leurs électeurs qui élirent un à un leurs députés entre le 5 et le 20 septembre 1792.

 

Seul Paris se passionna pour ces élections où les deux tendances Montagnarde et Girondine s'opposèrent violemment. Robespierre fut le premier des 24 députés parisiens à être élu (338 voix sur 525 votants), suivi par Danton (638 voix sur 700 votants) et Marat. Les Montagnards (Billaud-Varennes, Collot d'Herbois, Desmoulins, Fabre d'Eglantine, David ou le duc d'Orléans dit Philippe Egalité) dominaient très largement cette représentation qui avait reçu pour mot d'ordre "l'abolition de la royauté", "la peine de mort contre ceux qui proposeraient de la rétablir" et "un gouvernement républicain". Aucun Brissotin ne fut élu à Paris ni Brissot, ni Pétion suspecté de Brissotisme ni même Condorcet qui sera cependant élu par cinq départements.

 

En province, les assemblées primaires seront beaucoup plus modérées que dans la capitale. Une majorité d'entre elles demanderont une abolition de la royauté, certaines évoqueront même une république mais d'autres encore souhaiteront le maintien de la monarchie. La lutte Gironde - Montagne fut quasiment inexistante, ce furent des personnalités ou des notables qui furent élus. Coté Brissotin le département de la Gironde élut Vergniaud, Guadet, Gensonné ou Ducos, L'Eure-et-Loir Brissot et Pétion, les Bouches du Rhône Barbaroux. Coté Montagnard ce sont Reubell dans le Haut-Rhin, Merlin de Douai dans le Nord, Saint-Just dans l'Aisne, Carnot et Lebas dans le Pas-de-Calais. Les taux d'abstention furent très élevés de par la pratique du vote à haute voix et diverses pressions exercées sur les citoyens.

 

La Législative lors de sa dernière séance du 20 septembre 1792 avait appris le franchissement de l'Argonne par les Prussiens le 14 septembre. Ses derniers décrets furent ceux qui établissaient l'état-civil et l'autorisation de divorce. Le lendemain 21 septembre 1792 on apprendrait la victoire de Valmy et la Convention ouvrirait sa première séance publique.